
Si l'on en croit les encyclopédies, John Cage est né le 5 septembre 1912 et mort le 12 août 1992. Mais si l'on en croit notre cerveau et nos oreilles, il n'est absolument pas mort tant, en nous, sa pensée et sa musique résonnent encore.
En conséquence, le fait que 2012 corresponde à un double anniversaire ne doit pas – surtout pas – nous faire nous agenouiller pieusement devant l'oeuvre d'un homme qui fut le père (très) spirituel du mouvement Fluxus et n'eut de cesse de cultiver une revigorante irrévérence durant toute son existence. Ainsi, par exemple, s'employa-t-il sans relâche à désacraliser la pratique et l'écoute de la musique afi n de les ouvrir le plus possible. Dès 1937, dans son programmatique exposé sur Le Futur de la musique, véritable manifeste faisant écho à L'Art des bruits de Luigi Russolo, il réclame et prédit l'avènement d'une musique qui, rompant avec toute forme d'académisme, ne craigne pas de sortir du domaine strictement musical et s'ouvre à tous les sons, y compris ceux produits par des instruments électriques et y compris le bruit – ce bruit tant honni par les funestes tenants de l'ordre et du bon goût.
De même que, dans la tradition chinoise, le yin ne se conçoit pas sans le yang, dans la poétique de John Cage, si féru de philosophies orientales, le(s) silence(s) revêt(ent) une importance aussi cruciale que le(s) bruit(s) : la plus fameuse illustration en est offerte par 4'33'', pièce fascinante autour de laquelle semble graviter toute la musique occidentale du XXe siècle. Pourtant, à l'instar de toute l'oeuvre de Cage, cette pièce n'est en rien monumentale. Avec une calme insistance, elle nous murmure de ne pas statufi er son auteur et nous invite à l'approcher sans déférence. Oui, cette année plus que jamais, gardons-nous de commémorer quoi que ce soit et d'enfermer John dans une cage, aussi dorée soit-elle. Efforçons-nous plutôt de l'inscrire pleinement dans le temps présent..
Publié par Benoît Montigné
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