sonore
visuel

histoire et actualité
des arts sonores
et audiovisuels

S'inscrire à la newsletter

HERBERT EIMERT, WERNER MEYER-EPPLER ET AL, Foundation of Studio für elektronische Musik (Köln)
Si l'on en croit Konrad Boehmer, c'est un homme de science de l'institut de Phonétique de l'Université de Bonn, Werner Meyer-Eppler, mort en 1960, qui devrait être désigné plus que tout autre comme le père de la musique électronique. Il avait en effet entamé seul, dans les années 1948-49, des expérimentations sur la réalisation synthétique du son et s'était livré à des réflexions sur une potentielle composition musicale basée sur ce nouveau matériau. Dans le courant de l'année 1949, ce dernier se lie avec Herbert Eimert, producteur de musique à la Radio de Cologne et Robert Beyer, technicien au sein de la même radio. Au terme de deux années de discussions, d'expériences ils fondent ensemble le Studio de la radio de Cologne ; la date officielle est le 18 Octobre 1951.

Le père de la musique électronique

Si l'on en croit Konrad Boehmer, c'est un homme de science de l'institut de Phonétique de l'Université de Bonn, Werner Meyer-Eppler, mort en 1960, qui devrait être désigné plus que tout autre comme le père de la musique électronique. Il avait en effet entamé seul, dans les années 1948-49, des expérimentations sur la réalisation synthétique du son et s'était livré à des réflexions sur une potentielle composition musicale basée sur ce nouveau matériau. Du reste, si l'Allemagne connaissait jusqu'alors la dénomination musique électrique, c'est bien Meyer-Eppler qui a inventé le terme musique électronique. Puis, dans le courant de l'année 1949, ce dernier se lie avec Herbert Eimert, producteur de musique à la Radio de Cologne et Robert Beyer, technicien au sein de la même radio. Au terme de deux années de discussions, d'expériences ils fondent ensemble le Studio de la radio de Cologne ; la date officielle est le 18 Octobre 1951.

Le studio de la WDR de Cologne

Les premiers morceaux sont signés par Eimert et Beyer, mais très vite des clivages se développent quant à l'orientation musicale que devrait prendre le studio. L'école musicale allemande (Berg, Webern, Schönberg…) a en effet, comme on l'a vu, pris un poids conséquent dans l'histoire musicale, de par la formalisation de l'atonalité, de l'introduction du dodécaphonisme puis du sérialisme, c'est à dire une musique très abstraite, mais organisée sur la même structure de base que la musique classique, même étendue à un système plus ouvert. Eimert, de son côté, souhaite à cette époque prendre la relève de ce courant en introduisant l'électronique, c'est à dire qu'il voit en cette technique un simple outil ou instrument permettant d'établir cette filiation historique. Beyer, quant à lui, a une vision plus radicale et voit l'électronique comme une nouvelle matière appelant de nouvelles formes musicales. Il avait d'ailleurs publié en 1925 et 1928 ( ce dernier étant intitulé Problèmes d'une musique à venir) deux textes sur une éventuelle musique à électricité, dans laquelle l'espace jouerait un rôle primordial. Finalement, comme souvent dans l'histoire, un relatif conformisme a pris le pas sur une création plus innovante, mais plus difficile à mettre en place, et au terme de cette bataille c'est Eimert qui a alors dirigé seul le premier véritable studio de musique électronique. Nous voyons par le biais de cet exemple historique comment une pensée visionnaire, même dans un cadre technique concret peut se voir restreinte à un rôle mineur, et comment se perpétue finalement la répétition du même, alors qu'une technique nouvelle est mise en application dans un cadre artistique. La volonté intellectuelle qui va asservir la technique va elle-même être asservie par le biais d'intrications historiques, d'une volonté de reconnaissance. Puis, une fois le mécanisme enclenché, la boucle d'asservissement bloquée, il devient difficile de revenir au fondement des origines. Un choix d'orientation presque arbitraire devient peu à peu une norme à laquelle il est très difficile d'échapper ensuite.

En 1953, Karlheinz Stockhausen, après un bref passage aux studios parisiens de Pierre Schaeffer, est invité par Eimert pour participer aux expérimentations du studio de Cologne. Il est souvent considéré par les ouvrages historiques et par lui-même comme le père fondateur de la musique électronique, mais on sait qu'il a assisté aux cours de Meyer-Eppler, auquel il doit probablement nombre de ses connaissances en la matière. Il reste néanmoins qu'à partir de l'arrivée de Stockhausen, les recherches deviennent plus sérieuses, formalisées, mais restent axées sur le sérialisme. Puis, en 1954, un jeune compositeur, Gottfried Michael Koenig se joint à l'équipe du studio; il collabore avec Stockhausen et influe sur bon nombre des œuvres de ce dernier comme Gesang der Jünglinge et les Kontakte. Ces deux compositeurs n'ont toutefois pas la même démarche, et une des démarches importantes de Koenig consiste à dire "Si nous faisons quelque chose de nouveau, que ce soit quelque chose de nouveau sur le plan esthétique et méthodique aussi". Suite à différents conflits, c'est Stockhausen qui prendra la tête du studio, écartant brusquement Koenig. Celui-ci, dans les années 60, quitte Cologne pour créer l'Institut de Sonologie D'Utrecht, emportant avec lui l'esprit du studio lequel, aux commandes de Stockhausen, puis York Heller, perdra peu à peu son aura de vivier créatif, même si ses activités continuent encore aujourd'hui.

Nous n'avons ici transcrit qu'un bref survol des fluctuations formelles de cette époque, mais il suffit à distinguer dans ce tournant de l'histoire musicale l'influence des différents conflits relatifs aux orientations à prendre. Lorsqu'on demande à Konrad Boehmer, compositeur familier du studio, qui après quelques années de collaboration a quitté Cologne et Stockhausen pour retrouver la tradition perdue chez Koenig comment il voit l'avenir de la musique électronique, il répond qu'il ne la voit pas dans les formes traditionnelles du concert. Pour lui, et c'est aussi le centre de notre réflexion, le musique électronique doit créer de plus en plus son environnement, s'allier avec d'autres formes artistiques modernes comme par exemple le film ou toute autre forme visuelle. La réussite sur le plan esthétique dépendra ainsi des visions que les compositeurs déploieront, des techniques qu'ils inventeront pour les réaliser, et des "coalitions" qu'ils chercheront sur le plan artistique. Il précise que l'électronique vivra probablement de deux sources et s'en nourrira pour garantir son avenir, la première étant de s'allier avec d'autres formes artistiques (la sinesthésique), la seconde celle de l'émancipation spatiale. Pour lui en effet, la musique électroacoustique (c'est à dire la musique électronique au sens large) doit nécessairement créer de nouveaux types d'espaces sonores pour survivre, condamnant par là le concert traditionnel (deux bandes, deux haut-parleurs) à une mort inévitable.

Les différentes écoles de la musique électronique

Finalement, on voit l'émergence de deux courants principaux: la musique concrète, c'est à dire le modelage d'un matériau préexistant issu de sons naturels isolés, une musique acousmatique, au sens de Pythagore (qui dispensait ses cours derrière un rideau) en somme, s'apparentant à un travail artisanal de sculpture sonore; d'autre part, une musique plus intellectuelle au sens où sa réflexion, son concept précède sa réalisation; l'électronique est alors un moyen. 


Les autres articles

Chargement des articles...